Dans le cadre de la campagne mondiale contre la violence à l’égard des femmes et des filles, un groupe de jeunes a organisé, du 25 novembre au 10 décembre, une série d’activités sous le nom de 16JoursActivismeHaiti/CampagneOrange. Ce dimanche 10 décembre 2017, journée internationale des droits de l’homme, une marche symbolique et un lâcher de ballons ont clôturé ces 16 jours.

10 heures. Devant l’Église du Sacré-Cœur de Turgeau, une trentaine de personnes sont réunies. Elles portent toutes le même maillot orange sur lequel on peut lire « Campagne nationale, 16 jours d’activisme en Haiti. » Certains visages sont sérieux, d’autres sont plus souriants, mais tous montrent la même détermination. Dernière vérification des pancartes, du son, gonflement de quelques ballons, et tout est fin prêt. La marche pour dire non contre la violence à l’égard des femmes et des filles peut commencer.

A 10h45 AM exactement, la petite foule se met en branle. Sur fond de musiques de circonstance déversées par le haut-parleur d’un pickup payé pour l’occasion, hommes et femmes foulent le macadam. La procession longe l’avenue Jean-Paul II pour rejoindre la 3e avenue du travail. Les voix d’Emeline Michel et d’Ansy Dérose, des morceaux de Boukman Eksperyans accompagnent le cortège. Des passants, curieux, arrêtent quelques participants pour s'enquérir du bien-fondé de cette marche. Plusieurs voitures ralentissent, et les passagers prennent le temps de lire les messages écrits sur les pancartes. « Vyolans pa yon prèv lanmou », « Nan non Ginoue Mondesir », « Tout moun konsène » etc. sont autant de mots écrits pour dire que cette lutte n’appartient à personne, mais à tous.

L’idée d’une campagne pour dénoncer la violence (physique, verbale ou psychologique) dont femmes et filles sont l’objet avait muri dans l’esprit de Staël Nirvania Antoine, une jeune femme dégoûtée par ces pratiques barbares. Rapidement elle est rejointe par d’autres amis qui croient eux aussi qu’il faut un changement: Kathleen Jean Charles, Georgy Lundy, Fabigaelle Liboiron et Luigi François.

Accompagnés de deux photographes, JhoBram et Juan Carlos, ils ont d’abord commencé par les écoles. Ils passaient délivrer leur message aux plus jeunes, dans l’espoir que les citoyens et citoyennes de demain sauraient se comporter autrement que leurs aînés. Dans les rues de la capitale, ils ont également parlé aux passants, pour sensibiliser tout le monde sur les conséquences de ces actes immondes. Sur les réseaux sociaux, principalement Twitter, le hashtag #16JoursActivismeHaiti a été partagé encore et encore. Pour attester du succès de leur campagne, de grands présentateurs comme Carel Pedre, Wendell Théodore, ou encore des émissions à succès telles que Musiforum, Rendez-vous Visa, etc. les reçoivent. Dans chaque parole qu’ils prononçaient, les graines de la non-violence étaient semées.

La marche de ce 10 décembre était la dernière étape, et elle fut une réussite. Après l’avenue du travail, la petite troupe a descendu l’avenue Lamartinière. Et là, devant le ministère à la Condition féminine et aux Droits de la femme, les participants, sous la direction de Georgy Lundy, ont formé un cercle afin d’observer une minute de silence, en mémoire de toutes celles qui ont succombé sous ces mauvais traitements qu’ils dénonçaient. Puis, Farah Augustin et Marie-Henriette Mousson Roux, deux participantes, ont brièvement pris la parole pour délivrer un message. Dans leurs propos, elles ont souligné la forte participation des hommes à l’activité. Selon elles, cela montre que la bataille est de tous et qu’il faut la continuer ensemble.

Bricks et Brital, deux chanteurs du célèbre groupe de rap Barikad Crew, qui avaient rejoint la marche en cours de route, ont eux aussi tenu à faire entendre leurs voix. Pour eux, hommes et femmes ont droit à la protection, et ne doivent en aucun cas subir des violences liées à leur sexe, d’où qu’elles viennent. De chauds applaudissements ont marqué la fin de cette courte escale.

La marche reprend. A 11h45, les activistes arrivent au Champ de Mars, place de la Constitution. Un cercle est vite formé au pied du mât au sommet duquel flotte le bicolore national. Des ballons gonflés à l’hélium ont été confiés à tout le monde, ou presque. C’est l’heure du lâcher de ballons, partie hautement symbolique, en hommage à toutes les femmes, qu’elles soient victimes ou non de violences.

Simultanément, les ballons de couleur orange sont relâchés, et ils prennent rapidement leur envol dans le ciel bleu, prêt à les accueillir. On les suit des yeux pendant quelques temps. On avait l’impression que tout le monde pensait la même chose. On aurait dit que tous voudraient dire à ces magnifiques ambassadeurs de s’envoler toujours plus haut, et d’entrainer dans leur trajectoire inconnue toutes les violences, tous les traitements inacceptables que connaissent femmes et filles dans notre pays. On espère qu’ils l’ont fait.

Il est vrai cependant que 16 jours ne suffisent pas pour éradiquer la violence. L’équipe de 16JoursActivismeHaiti le sait bien, et pour elle cette activité n’était qu’un premier pas, même s’il est important. L’année prochaine, la campagne aura encore plus d’ampleur promettent ces jeunes.  L’engagement de tout le monde, d’après eux, est nécessaire car la violence, quelle que soit sa forme, quelle que soit sa cible, n’a jamais aidé à construire une société meilleure.

 

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